Médiatisation et suicides : trouver l'équilibre entre information et risque d'incitation
 LAUSANNE - Comment informer à propos d'un suicide sans risquer d'inciter d'autres passages à l'acte et sans le banaliser ? Dans un rapport publié mercredi à Lausanne, Stop Suicide conseille de ne pas détailler la méthode et d'informer aussi sur les structures d'aide.
LAUSANNE - Comment informer à propos d'un suicide sans risquer d'inciter d'autres passages à l'acte et sans le banaliser ? Dans un rapport publié mercredi à Lausanne, Stop Suicide conseille de ne pas détailler la méthode et d'informer aussi sur les structures d'aide.
L'association a examiné 158 articles parus dans les dix principaux quotidiens romands entre janvier et juin 2012. Lorsqu'un média décide d'informer le public à propos d'un suicide, il s'agit généralement d'un individu, d'une méthode ou d'un endroit qui sort de l'ordinaire, relève Stop Suicide.
Il découle de ce constat que "le contenu des médias n'est pas représentatif de la réalité du suicide". Ne donner à voir que les cas atypiques ou spectaculaires renforce la désinformation sur le suicide, souligne le rapport.
Par exemple, les suicides d'enfant attirent l'attention de tous les médias alors qu'ils sont en réalité très peu nombreux. Inversement, le suicide des personnes âgées ou des jeunes, pourtant particulièrement touchés, est peu thématisé.
Cas suisses: plus de retenue
La plupart des articles recensés concernaient des suicides à l'étranger. Stop Suicide remarque que le traitement médiatique des cas en Suisse est plus prudent, "peut-être en raison d'une plus grande proximité émotionnelle".
Le rapport pointe une "certaine romantisation du suicide", surtout dans le cas des personnes connues. Il relève aussi une tendance à décrire, voire à illustrer, la méthode ou le lieu du suicide. Or, donner trop de détails sur les moyens utilisés peut avoir un effet incitatif, surtout s'ils sont à la portée de chacun.
Les médias relaient des idées reçues sur le suicide en parlant de suicide "raté" ou "réussi", de "vague de suicides", ou encore en soulignant les projets ou la réussite de la victime. Le suicide constitue souvent un acte impulsif. Une crise suicidaire peut intervenir à n'importe quelle étape de la vie, même si la période semble positive pour une personne, souligne l'association.
Ne pas dramatiser
Pour informer correctement sur le suicide en général ou sur un cas particulier, Stop Suicide recommande de bannir la dramatisation. Le reportage à sensation devrait être évité, surtout pour les personnes connues. Romantiser la mort, "en faire une amante que l'on irait rejoindre", est aussi contreproductif.
Les milieux de la prévention préconisent de mettre l'accent sur le deuil de la personne décédée ou de mentionner comment elle aurait pu trouver de l'aide. Les reportages montrant des personnes ayant eu des idées suicidaires sans être passées à l'acte ont "un réél impact préventif", de même que l'information sur les facteurs de risque et les symptômes d'alerte.
Journalistes peu au courant
Stop Suicide a entrepris de visiter les rédactions pour sensibiliser les journalistes à la problématique. Ceux-ci connaissent peu les ressources à disposition, les recommandations des milieux de la prévention, ni même les recommandations internes à la profession, constate le rapport.
L'association va poursuivre ses efforts d'information. Elle fonde aussi de grands espoirs sur le partenariat initié cette année avec les instituts de formation des journalistes en Suisse et dans les pays francophones.
ATS, 26 septembre 2012
