Et si la vraie valeur de la pharmacie d’officine était l’hospitalité ?

Et si la vraie valeur de la pharmacie d’officine était l’hospitalité ?


ARTICLE POUR PROFESSIONNELS 
Domaineleadership
Mots-clés : qualités émotionnelles, hospitalité, service client
Niveau de difficulté de l’article : moyen (sur 3 niveaux : facile, moyen et difficile)

CHICAGOLe monde évolue très vite, pensez par exemple qu’il y a 5 ans WhatsApp n’existait pas et qu’il y a 10 ans presque personne n’avait un smartphone. En 2005, si vous aviez une question sur la cystite, vous la poseriez peut-être à votre pharmacien ou assistante en pharmacie. En 2018, ce même client va peut-être aller sur Google, qui propose des dizaines de sites Internet, sur YouTube (25% des Suisses visitent YouTube chaque jour) ou pourra la poser rapidement sur WhatsApp à une amie qui a eu cette maladie. La réponse est gratuite et très rapide. Attention, je ne dis pas que le pharmacien et son équipe ne sont plus là pour répondre aux nombreuses questions médicales parfois complexes, bien au contraire. Mais peut-être que le volume de questions simples en tout cas a diminué. Les questions difficiles subsistent mais par définition elles sont plus dures à répondre, prennent du temps et diminuent peut-être la rentabilité de la pharmacie. Autrement dit, la valeur ajoutée de l’équipe de la pharmacie se trouve peut-être plus en 2018 dans l’excellence du service client, on peut aussi parler d’hospitalité, que seulement dans le conseil médical ou pharmaceutique pur. Un autre problème avec la technologie comme Instagram ou Google est que tout se copie très vite. Une vitrine peut être dupliquée tout comme des rabais (ex. 3 pour le prix de 2) ou même des cartes de fidélité mais copier un excellent service client est bien plus complexe. C’est pourquoi une grande partie de la valeur immatérielle de la pharmacie peut s’y cacher. Ce billet de blog est influencé d’une présentation qui s’est tenue dans la région de Chicago (Etats-Unis) en août 2018, au Global Leadership Summit.

Ecouter le client

Si un client vient à la pharmacie et demande : « Est-ce que vous avez du Panadol ? ». Un pharmacien pourrait lui proposer un autre médicament à base de paracétamol. Mais si ce même client insiste sur le Panadol, vous comme pharmacien attentionné au service client ne devriez pas « montrer que vous avez raison » mais rendre le client heureux. Car peut-être il n’a jamais étudié la chimie, il n’a aucune idée de ce qu’est une molécule. Pour lui, s’il a mal à la tête, le Panadol fonctionne mais pas le Dafalgan par exemple. Bien sûr cela demande un effort pour nous pharmaciens, avec une façon de penser souvent très cartésienne et scientifique, mais comme on dit en général dans le capitalisme : sans client pas d’entreprise. Ce n’est pas que le client est roi, mais c’est qu’on doit faire en sorte qu’il ne se sente pas humilié, qu’il soit au centre de toutes les attentions. En pharmacie, à la différence probablement de la politique avoir toujours raison n’est pas une bonne idée. 

Exemple venu de la restauration, pas de pourboires

Danny Meyer est un célèbre restaurateur américain invité dans des conférences sur le leadership et auteur de livres à succès. Dans une Amérique obsédée par les pourboires (tipps), ce qui est très pénible pour les touristes européens, il a réussi dans ses restaurants à les supprimer. C’est un exploit, car les pourboires sont la véritable « huile de moteur » du capitalisme américain des restaurants. Plus le garçon ou serveur vend, plus il touche de pourboires (15% ou plus), et forcément plus le patron ou propriétaire fait de chiffre d’affaires, un très classique win-win. Cela signifie qu’il faut être un grand leader comme M. Meyer pour arriver à faire tourner un restaurant aux Etats-Unis, en plus à New York, sans pourboires en incluant la marge et le salaire dans le prix final. Dans l’équation du restaurant américain avec pourboires le client peut se sentir un peu abusé. Comme si le restaurateur voulait extraire le maximum de dollars de son compte plutôt que lui garantir la meilleure expérience possible (la fameuse User Experience ou UX).

Le premier principe à retenir est que peut-être proposer des bonus aux employés en pharmacie en fonction des ventes n’est pas forcément une excellente idée dans la recherche de l’excellence en hospitalité. Le risque est que le client se sente stressé d’acheter la dernière vitamine ou parfum en promotion.

La recette du succès pour une excellente hospitalité – 49%

Si on reste dans le domaine de la restauration, les ingrédients du restaurateur Danny Meyer sont simples. Tout d’abord, les valeurs techniques d’un employé (ex. bon cuisinier, bon serveur) ne peuvent jamais dépasser 49% de la valeur totale de l’employé. Vous comprenez que c’est un concept et pas un chiffre si précis comme 49%. A l’inverse les valeurs d’hospitalité de l’employé sont de 51%. Appliqué à la pharmacie, c’est comme si un pharmacien qui a fait que des notes 6 à l’université (meilleure note) ne pourrait jamais valoir plus que 49%. Les autres 51% sont à chercher dans sa propre personnalité, son côté « hospitalité ».

6 qualités à avoir

Pour Danny Meyer, 6 qualités sont à rechercher dans le recrutement de nouveaux employés et la valorisation des employés actuels pour ses différents restaurants comme son célèbre Union Square Cafe à New York :

1. Gentillesse. Se montre toujours gentil avec les employés et les clients. 

2. Curiosité. Avoir envie d'apprendre de nouvelles choses. Dans la pharmacie, l'envie de se former en continu. 

3. Ethique au travail. Effectivement on l’oublie souvent, mais un employé 100% honnête est une grande valeur pour une entreprise, par exemple par rapport à la caisse ou même la facturation aux assurances.

4. Empathie. Comment être dans la peau du client pour bien et mieux le servir.

5. Bien se connaître. Selon M. Meyer, si un employé un jour est de mauvaise humeur ou a « mal dormi », il doit être capable de bien se connaître et informer l’équipe qu’il n’ira peut-être pas servir certains clients. On ne peut pas être chaque jour au top.

6. Intégrité. Faire le travail toujours correctement pour l’entreprise même si personne ne regarde (ex. absence du chef). Cela complète le principe d’éthique au travail.

M. Meyer explique qu’il peut s’agir peut-être de principes ou règles simples, mais à la fin la différence est énorme dans le service client et selon lui des employés qui ont ces 6 qualités valent plus qu’une personne plein de diplômes mais qui n'auraient pas ces qualités.

Exemple pratique

Finalement, pensez à une chose. Si un jour vous aidez un client âgé à ramener ses courses du supermarché chez elle ou que vous répondez correctement à une de ses questions sur les antibiotiques. Trois ans après, quand elle parlera de vous à son amie pas contente de la pharmacie où elle va qui n’est pas votre pharmacie, elle va se rappeler de la question sur les antibiotiques ou de la grande gentillesse d’avoir ramené ses courses chez elle ? Il me semble que la réponse est simple. Notre cerveau est souvent plus émotionnel (courses) que rationnel (antibiotiques).

Concrètement, vous pouvez créer un fichier Excel ou Google Drive (spreadshit) avec le nom de tous les employés et à droite du nom 6 colonnes pour les 6 qualités mentionnés ci-dessus. Vous évaluez ensuite avec une note de 1 à 10 chacune des qualités pour chaque employé. Si les notes sont vraiment mauvaises et sans possibilité d’amélioration, vous n’aurez probablement pas d’autres choix que de licencier (un vrai leader doit parfois faire ce « sale boulot », sinon essayez de travailler pour améliorer le service client de chacun de vos employés).

L’outil PharmaproRH peut aussi vous aider d’aller dans le sens d’une meilleure prise en charge des employés et un moyen de limiter le turn-overPharmaproRH est gratuit en version test de 14 jours sans obligation d’achat.  

Le 5 décembre 2018. Par Xavier Gruffat. Sources : The World Leadership Summit 2018 (région de Chicago), page Wikipedia.org de  Danny Meyer. Crédit photo : Adobe Stock. 

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