Faire plus confiance aux patients pour contrer l'antibiorésistance
BERNE - Les malades demandent souvent à leur médecin des antibiotiques inutiles, ce qui favorise l'antibiorésistance. Selon une étude soutenue par le Fonds national suisse, faire davantage confiance aux patients pourrait permettre d'y remédier.
Cinq millions de personnes décèdent chaque année des suites d'une infection bactérienne car les agents pathogènes sont résistants aux antibiotiques, indique mardi un communiqué. Selon l'OMS, ce chiffre aura doublé d'ici 2050. Si les nouveaux traitements peuvent freiner cette évolution, l'usage responsable de ces médicaments est au moins aussi important.
Peter J. Schulz, spécialiste en sciences de la communication cité dans le communiqué, souhaite comprendre dans quelle mesure le comportement humain contribue à aggraver le problème de la résistance. Son équipe à l'Université de la Suisse italienne a découvert un élément qu'elle juge décisif pour y parvenir : la confiance des médecins de famille envers leurs patients.
En effet, près de 90% des antibiotiques sont prescrits au sein des cabinets des médecins de famille. Les patients demandent souvent qu'on leur en prescrive, même si ce n'est pas indiqué du point de vue médical. Et parfois, le médecin accède à cette demande. Il existe plusieurs raisons à cela, parmi lesquelles le manque de temps en consultation et la volonté de ne pas entrer en conflit.
Les chercheurs ont interrogé huit médecins de famille et 101 de leurs patients en Suisse italienne. Ces derniers ont notamment dû indiquer s'ils demanderaient activement des antibiotiques lors d'une consultation.
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Prescription différée
Les personnes se considérant comme sujettes aux maladies, qui souhaitent bénéficier d'un traitement aussi complet que possible, sont plus enclines à demander la prescription d'antibiotiques. Il en va de même pour les hommes et les personnes ayant un niveau d'éducation moins élevé, vers qui il existe un retard à rattraper dans la transmission des connaissances.
L'étude a également évalué le niveau de confiance que les deux parties se témoignent. Lorsqu'un médecin fait davantage confiance à la personne malade, cette dernière demande moins d'antibiotiques. Si les chercheurs admettent que d'autres études seraient nécessaires pour comprendre ce phénomène en détail, ils soulignent que cette découverte peut déjà être mise à profit pour réduire la consommation d'antibiotiques superflues.
Cela pourrait se faire par le biais d'une prescription différée : le médecin établit une ordonnance qui ne peut être honorée qu'après quelques jours, si le traitement est toujours indiqué à ce moment-là. En effet, lors d'affections virales bénignes, l'état s'améliore souvent spontanément après quelques jours. Selon Peter J. Schulz, cette méthode a permis de réduire sensiblement la consommation d'antibiotiques dans certains pays, à l'image des Pays-Bas.
C'est une question de responsabilisation. Il s'agit pour le médecin de faire confiance dans la capacité des patients à évaluer correctement leur état de santé, et à prendre des médicaments seulement si c'est vraiment nécessaire. "Mais cela ne signifie pas que les personnes malades recevront un antibiotique à chaque fois qu'elles le souhaitent", prévient le chercheur.
Le 26 août 2025. Sources : Keystone-ATS. Crédits photos: Adobe Stock, Pixabay ou Pharmanetis Sàrl (Creapharma.ch).
