Les médicaments vendus en Suisse trop chers par rapport à l'Europe
BERNE - Les médicaments vendus en Suisse sont nettement plus chers qu'en Europe. La marge de distribution est en moyenne 25% supérieure à celles de six pays européens comparés, selon une étude de santésuisse. Pour la faîtière des caisses maladie, le potentiel d'économie est de 300 millions de francs.
Ce résultat émane d'une étude présentée mercredi à Berne qui compare les prix suisses avec ceux du Danemark, de l'Allemagne, de l'Angleterre, des Pays-Bas, de la France et de l'Autriche. Ces six pays de référence sont les mêmes que ceux que retient l'Office fédéral de la santé publique (OFSP).
L'étude montre que les marges de distribution en Suisse pour les médicaments soumis à ordonnance sont les plus élevées, les autres pays européens ayant des marges jusqu'à 45% inférieures. La différence est d'en moyenne 25%, a indiqué Stefan Holenstein, directeur ad interim de santésuisse.
Pour son analyse, santésuisse a pris en compte 6700 médicaments remboursés par les caisses maladie. Elle a calculé la marge de distribution de ces produits, soit la différence entre le prix au sortir d'usine et le prix public, mais sans la rémunération basée sur les prestations (RPB) que touche les pharmaciens. Elle a également tenu compte d'un facteur de correction pour chacun des pays européens (salaires, loyers et taux d'intérêt).
Les pharmacies qui représentent le canal de distribution le plus important (58%), prennent une marge en moyenne 25% supérieure à celles pratiquées par les pays de comparaison. Les marges des 7150 médecins qui fournissent directement à leurs patients des médicaments (30%) sont également de 25% plus élevées.
1,5% de primes en trop
Sur les 4,8 milliards de francs versés en 2010 par les assureurs pour des médicaments soumis à ordonnance, la marge de distribution s'est établie à 1,3 milliard de francs, selon cette étude. Partant du constat que les Suisses paient en moyenne un quart de plus que les Européens, santésuisse demande que la marge suisse soit ramenée au niveau moyen des six autres pays comparés.
Cette mesure permettrait d'économiser 300 millions de francs, avancent les assureurs. Cela représente 1,5% de primes par année. Pour parvenir à des prix compétitifs, les caisses maladie demandent à négocier directement les marges avec les partenaires commerciaux, ce qui nécessiterait un changement de l'ordonnance fédérale.
Pour Stefan Holenstein, les choses devraient aller assez vite, avec une modification de l'ordonnance fédérale pour fin 2012 afin que les économies puissent être réalisées dès 2013.
Si, à l'issue de leurs négociations les partenaires ne présentent pas de résultat, les marges devraient être fixées par voie d'ordonnance conformément aux exigences de santésuisse et du surveillant des prix. En février, ce dernier a recommandé à l'OFSP de réduire la marge sur les médicaments. Selon lui, le potentiel d'économies annuel est de 130 millions de francs.
Mécontents
Quelques représentants des pharmaciens et des médecins présents à la conférence de presse ont contesté la méthodologie de l'étude. S'exprimant à l'heure des questions des journalistes, l'un d'entre eux a déclaré que les économies demandées aux pharmacies, qu'il évalue à 200 millions de francs, signifieraient la fermeture de deux tiers des officines.
Claude Ruey, président du conseil d'administration de la faîtière, a répliqué qu'il était légitime pour les assureurs de chercher des solutions pour baisser les prix.
Du point de vue de l'OFSP, la solution de santésuisse de tailler dans les marges n'est pas très originale. Négocier les tarifs à la baisse est certes un bon début, mais reste à savoir selon quels critères, a indiqué à l'ats Andreas Faller, vice-directeur de l'OFSP. Pour lui, il s'agit aussi de garder en tête le service à la population.
ATS, 23 novembre 2011