Vacances : Les milieux économiques font le forcing contre l'initiative


Avant-papier

BERNE - Les efforts des milieux économiques pour éviter que la population ne cède aux sirènes des six semaines de vacances pour tous les travailleurs semblent porter leurs fruits. A un mois des votations du 11 mars, l'initiative des syndicats est mal partie, d'après un récent sondage.

Depuis 1984, la loi accorde un minimum de quatre semaines de vacances par an à tous les travailleurs. Les jeunes ont droit à cinq semaines jusqu'à 20 ans. Mais diverses branches et administrations publiques offrent davantage de jours fériés à leurs employés, portant la moyenne nationale à cinq semaines par an.

L'initiative populaire, lancée sous la houlette de l'organisation faîtière syndicale Travail.Suisse, vise à accorder au moins six semaines de vacances payées à tous. En comparaison internationale, la Suisse caracole en tête pour ce qui est de la durée de travail hebdomadaire et figure à la traîne pour les congés payés.

Stress coûteux

Un tiers des personnes actives souffrent du stress au travail, une tare qui occasionne des coûts évalués à 10 milliards par an environ, fait valoir le comité d'initiative. Dès 55 ans, 20% des hommes sont à l'assurance invalidité.

Il est temps que les travailleurs récoltent les fruits de la croissance de leur productivité, qui a bondi de 20% entre 1992 et 2007. Puisque les salaires réels n'ont progressé que de 4,3% dans le même temps, il faut agir sur les vacances qui n'ont pas bougé depuis bientôt 30 ans, estiment les syndicats et le camp rose-vert.

L'entrée en vigueur de l'initiative serait échelonnée: dès l'an prochain, le droit légal passerait à cinq semaines pour tout le monde puis, à raison d'un jour de plus par an, à six semaines en 2018. Une semaine de vacance supplémentaire reviendrait à 2% de la masse salariale ou 6,8 milliards de francs au total.

Trop cher

Le camp bourgeois, la droite, les milieux économiques et le Conseil fédéral jugent que la facture est trop salée. En particulier pour les PME, qui risquent de supprimer nombre d'emplois ou de délocaliser. L'idée intervient au plus mauvais moment, avec la crise du franc fort.

Les opposants refusent de croire à un effet bénéfique du passage à 6 semaines de vacances sur la santé des employés. L'allongement de congés pousserait les PME à augmenter la cadence avant et après les vacances, selon eux. Au lieu d'apporter davantage de repos, l'initiative signifierait donc plus de stress.

En outre, les salariés préfèrent aujourd'hui d'autres méthodes de compensation que des vacances. Par exemple des horaires flexibles. L'initiative est certes "sympathique", mais elle risque de se retourner contre les travailleurs, a dit la conseillère fédérale Simonetta Sommaruga.

Le gouvernement doute que l'obligation de prendre plus de vacances soit la bonne réponse au problème du stress. L'initiative ne précise pas comment les absences prolongées dues aux congés supplémentaires devraient être compensés.

Sondage défavorable

"Le Conseil fédéral et le Parlement ne sont pas opposés aux vacances", affirme la socialiste. Ils ne souhaitent cependant pas inscrire des semaines supplémentaires dans la constitution fédérale.

La population ne semble quant à elle plus vraiment séduite par l'idée. Alors que les sondages donnaient jusqu'ici l'initiative gagnante, l'enquête SRR publié vendredi passé ne lui accorde plus que 39% de "oui", contre 55% d'avis défavorables. Les prochaines semaines seront cruciales. Mais les moyens des syndicats risquent de ne pas suffire face aux efforts déployés par les milieux économiques.


ATS, 6 février 2012

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