Interview avec la pharmacienne cantonale de Genève : Mme Vernaz-Hegi


INTERVIEW EXCLUSIF

GENEVE - Madame Vernaz-Hegi est titulaire du diplôme fédéral de pharmacien, d'un doctorat (PhD) en sciences pharmaceutiques, d'un MBA en sciences économiques et d'un Privat Docent de la faculté de médecine de l'Université de Genève (Unige). Au sein de la direction générale de la santé du canton de Genève, Mme Vernaz-Hegi dirige un service d'une quinzaine de personnes constitué du secteur médicaments et du secteur produits chimiques. La commission cantonale d'éthique de la recherche lui est également rattachée. Son service est notamment responsable de la surveillance des pharmacies et de diverses institutions et professions de santé comme les laboratoires ou les commerces d'optiques. Il surveille le marché des produits thérapeutiques et veille à l'application des prescriptions relatives aux produits chimiques. Pharmapro.ch a pu l'interroger par e-mail pour mieux comprendre ses différentes tâches et son rôle important dans la vaccination anti-Covid. 

Pharmapro.ch (Xavier Gruffat, pharmacien) - Madame Vernaz-Hegi, merci de nous accorder un interview par e-mail. On sait que vous êtes très occupée actuellement, notamment avec la vaccination contre la Covid-19. J'aimerais tout d'abord revenir sur votre formation de pharmacienne. Où avez-vous étudié la pharmacie puis effectué votre doctorat ?
Mme Vernaz-Hegi - Toutes mes études ont été réalisées à la faculté des sciences pharmaceutiques (diplôme de pharmacienne et doctorat) dans le canton de Genève.

Est-ce que vous avez travaillé à un moment de votre carrière en pharmacie d'officine ?
Oui, j'ai non seulement travaillé en pharmacie d'officine, mais j'étais responsable d'une officine en ville durant plusieurs années.

Vous avez encore complété votre formation par un MBA en sciences économiques et un Privat Docent de la faculté de médecine de l'Université de Genève (Unige). Pouvez-nous dire ce que cela vous a apporté, notamment pour exercer votre poste actuel de pharmacienne cantonale ?
Pour exercer le poste de pharmacienne cantonale, il est nécessaire de connaître les lois, mais aussi préparer les budgets, recruter et gérer des équipes, la communication, des projets de grande envergure comme celui de la campagne de vaccination dans le canton de Genève et avoir une connaissance de l'environnement économique dans lequel nous évoluons. Ces concepts m'ont été enseignés dans le cadre du MBA et m'a permis de proposer une vision dès mon 1er jour, une stratégie, des réponses appropriées, et d'évoluer dans un environnement composé de beaucoup incertitudes liées à une pandémie sans précédent. Le/la pharmacien-ne est le spécialiste du médicament, le privat-docent me permet d'enseigner à la faculté des sciences pharmaceutiques et biomédicales de médecine humaine et faire de la recherche sur le cycle du médicament depuis sa conception, la mise sur le marché, l'intérêt de l'industrie à contrer l'arrivée des génériques sur le marché, l'impact des décisions de la liste des médicaments en milieu hospitalier sur les coûts de la santé en ville et finalement l'impact de la consommation des médicaments sur l'environnement. En tant que pharmacienne cantonale avoir ces connaissances permet de relever les défis de demain de notre profession en toute confiance.

Si une jeune pharmacienne nous lit, comment est-ce qu'on devient pharmacienne cantonale ? Justement en multipliant les formations et en travaillant comme vous aux HUG ? Une sorte de voie royale...
Mon parcours est atypique et il n'y a aucune voie royale ni aucune garantie. Il est vrai qu'en ayant évolué en tant que pharmacienne en officine, en milieu hospitalier, dans l'humanitaire, en enseignant dans différentes facultés et publiant des articles dans des revues à politique éditoriale tout en connaissant les lois, mon dossier était robuste.

Vous avez pris vos fonctions plus ou moins en pleine pandémie, soit en novembre 2020, pas forcément le meilleur moment pour affronter une telle crise et surtout mettre en place avec vos équipes la vaccination dans le canton de Genève ? Comment avez-vous vécu ce moment ?
C'est certain que prendre une fonction si importante en pleine pandémie est un challenge majeur. J'ai eu la chance d'être bien préparée puisque j'avais vécu la pandémie au cœur de l'hôpital et m'étais engagée en tant que pharmacienne adjointe agrégée à la direction médicale et qualité des Hôpitaux Universitaire de Genève.  Lors de ma prise de fonction, j'ai pu aussi compter sur des équipes compétentes sur lesquelles je me suis appuyée.

Parlons encore un peu de la vaccination, une pharmacienne gérante vaudoise me faisait remarquer que dans le canton de Vaud et d'autres cantons, le pharmacien et même certaines assistantes en pharmacie formées peuvent vacciner contre la Covid-19. Par contre dans le canton de Genève, la vaccination Covid-19 n'a pas été ouverte aux pharmacies (si je ne fais pas erreur). Est-ce que c'était une décision légale, politique ou un choix de votre part ? Est-ce que dans le futur les pharmacies genevois pourront vacciner contre la Covid-19 (ex. rappel) ?
Les pharmacien-ne-s du canton de Genève ont été très et sont présents pour la vaccination contre le SARS-CoV2 et le canton a financé la formation des assistantes en pharmacie à la vaccination contre le SARS-CoV2. Tous les cantons ont le devoir d'apporter des réponses appropriées. Avec sa grande superficie qui le caractérise, le canton de Vaud a mis en place un dispositif de déploiement dans de multiples points pour couvrir les besoins, alors qu'au contraire le canton de Genève est caractérisé par une très grande densité et une très petite superficie permettant au canton d'avoir une stratégie particulièrement efficiente en termes de ressources engagées d'une vaccination  dans les centres de vaccination, dont plusieurs sont et ont été menés par des pharmacien-ne-s.

La pandémie a mis en lumière votre travail, vous êtes d'ailleurs apparue plusieurs fois dans les grands médias romands comme la RTS - par exemple à Forum, mais si on quitte un peu la Covid-19, comment résumer votre travail au quotidien ? Quel message aimeriez-vous transmettre aux centaines de pharmaciens genevois sur votre rôle.
Mon travail est très diversifié et passionnant. J'exerce une surveillance des professions de pharmacien-ne-s, des opticiens, et suis le garant de l'évolution et le respect des lois en matière de produits chimiques et thérapeutiques. De grands défis nous attendent, mais je suis confiante de la suite à venir. La pandémie a été et est un accélérateur incroyable qui a permis au/ à la  pharmacien-ne de contribuer activement et montrer ses compétences non seulement en vaccinant la population contre le SARS-CoV2, mais en proposant le testing, la production et distribution de solutions hydro alcoolique, et en s'engageant sans faille auprès de la population.

Interview réalisé par e-mail entre janvier et mars 2022. Avec l'aide et la supervision de Monsieur Laurent Paoliello, Directeur de la coopération et de la communication de la République et Canton de Genève. Chez Pharmapro.ch, Xavier Gruffat s'est occupé de l'interview. Relecture : Seheno Razanamanga (Pharmapro.ch).

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